Sommes-nous réellement altruistes ?

Sommes-nous réellement altruistes ?

Si je suis altruiste, n’est-ce pas par égoïsme …L’altruisme relève t’il d’un souci de construction de mon image personnelle?

 

Il nous est tous déjà arrivé de venir en aide à une personne en mettant de côté nos impératifs du moment. Sur la base de recherches scientifiques novatrices de Sylvie Gilman et Thierry de Lestrade nous savons désormais qu’aider l’autre est dans la nature humaine et que les comportements altruistes relèveraient non de l’acquis, mais de l’inné.

Dès leurs plus jeune âge, les enfants tendent spontanément à aider une personne qui en aurait besoin. De nombreuses recherches ont également démontré que l’on retrouve ce comportement de coopération chez les animaux. En revanche comme le montre une étude de l’institut d’anthropologie de l’évolution Max-Planck à Leipzig, le caractère d’égalité sociale serait spécifique à l’homme. En effet, lorsque l’on donne une quantité de nourriture non égale à deux Bonobos, ces derniers ne montrent pas de signes de protestation tant que chacun obtient au moins un petit peu de nourriture. Mais aider l’autre ne reviendrait-il pas à se donner simplement bonne conscience ? L’altruisme existe t’il vraiment ?

 

La première chose qui s’avère intéressante d’observer est la situation dans laquelle nous aidons le plus. Il va de soi, que le comportement d’aide ne se retrouvera pas dans des situations trop dangereuses ou des situations où nous ne nous sentons pas capables d’aider. Mais aiderions nous les autres si personne n’était là pour nous récompenser, nous remercier de notre geste ? Qui n’a jamais râlé au volant de sa voiture lorsque le piéton que l’on laisse gentiment traverser ne nous témoigne aucun signe de gratitude!

C’est bien là toute la complexité de la question car le véritable altruisme est un geste désintéressé, sans attendre de remerciement en retour. Le désir de reconnaissance est un besoin inhérent à la nature humaine tout comme le besoin d’affection et d’estime et être attentif, bienveillant avec les autres nous rend davantage heureux. Dans la plupart des livres de psychologie positive on peut constater que l’altruisme est cité comme l’une des clefs pour être plus heureux. Mais si cela nous rend si fier de nous c’est donc que nous faisons cela en premier lieu pour nous, afin d’en tirer une satisfaction personnelle.

Aider l’autre qui en a besoin nous pose dans une situation de sauveur qui peut s’avérer parfois pathologique. En effet, on observe chez certains individus un fort besoin de reconnaissance et de narcissisme qui pousse la personne à voler au secours des autres… Et à le faire savoir. Cette quête de pouvoir cachée peut s’avérer être «une manière d’apaiser la propre peur de l’abandon qui le mine», estime la psychologue Gene Ricaud-François.
Dans une autre perspective, un individu qui n’aura eu de cesse d’avoir des comportements altruistes sans jamais rien obtenir ni demander en retour risquerait de développer une souffrance que l’on nomme la codépendance. Cette caractéristique est décrite dans le livre Le Syndrome du sauveur, Éd. Eyrolles de Mary C. Lamia et Marylin J. Krieger, psychologues californiennes et qui témoigne d’un besoin de reconnaissance lié à une blessure narcissique impossible à surmonter.

 

« Satisfaction sublime de l’égoïsme, l’amour porte en lui, inséparables, les deux aspects : l’amour reçu et l’amour donné. …L’aspect sublime de l’amour est le don de soi. Mais ce don exige la réciprocité. Seul l’amour sentimentalement surchauffé accorde le don gratuitement ; mais l’égoïsme sous-jacent ne tardera pas à se manifester ; l’amour exalté se chargera de rancœur (amour-haine) … ». Paul Diel, Psychanalyste.

 

Rédigé par Karla Bernat.

 

 

 

Crédit Photo Benoit Courti.